De Santiago de Cuba, nous étions si près de la Jamaïque (à tel point que certains Cubains la rejoignent en 48h à la rame en barque de pêcheur) que nous avons décidé de faire un crochet vers le Sud et avons donc rejoint Port Antonio, petite ville du NE, éloignée des zones touristiques et des « resorts » de Montego Bay. La charmante marina Erroll Flynn, et sa petite piscine est attenante au marché et au cœur de ville ( un petit côté anglais, une rue principale, quelques bâtisses coloniales, une grosse église et les restes d’une activité portuaire bananière qui avait induit le début du tourisme fin XIX° pour riches Bostoniens : une ville de province posée dans un double amphithéâtre, vraiment tranquille…
Le problème immédiat est que les Jamaïcains parlent un « patwa »anglais totalement inintelligible ! Heureusement ils sont vraiment charmants et mise à part la secrétaire de la marina, ils font l’effort de convertir en anglais à la demande, avec un accent mi américain, mi créole. C’est donc resté assez « sport » !
La Jamaïque est la plus « africaine » des Grandes Antilles, la pauvreté est très visible dans les villes et surtout dans Kingston surpeuplée (1,2 million d’ ha). Détruite par un tremblement de terre en 1907, la ville s’étale dans une large demi-cuvette aux quartiers très séparés : Sur les hauteurs, « uptown » les riches zones résidentielles et « New Kingston » bâtis sur le modèle américain. A mi pente, « Half Way Tree » où réside la classe moyenne et d’où nous avons rayonné. Plus au sud, « Down town », qui offre quelques bons musées, est désertée le soir et les bidonvilles de Tivoli Garden et Trench Town sont déconseillés en raison de la misère et de la guerre que s’y livrent les gangs. Un petit tour en voiture y a été notre seule incursion.
La Jamaïque c’est quand même et surtout Bob Marley et le phénomène rastafari né dans les années 1930 : mouvement afro-nationaliste qui prône le retour vers l’Afrique de tous les Africains d’origine et qui considère l’empereur d’Ethiopie, Hailé Sélassié, comme le messie annoncé par la prophétie et nouveau chef divin. Les Rastas, qui sont aujourd’hui 10% de la population sont pacifiques, méditatifs, chanteurs de Reggae, coiffés de dreadlocks et souvent végétariens Nous avons eu la chance inouïe de trouver une super adresse pour le concert du vendredi dans le jardin d’un ancien guitariste de Bob Marley, Earl Chinna Smith, où une concentration de vieux rastas et de plus jeunes chanteurs de reggae viennent chanter à leur tour au milieu des volutes de ganja, vraiment un gros nuage! Un moment incroyable !!! Les autres lieux musicaux sont, comme partout dans les Caraïbes envahis par des « sound systems », empilements de haut-parleurs qui produisent des décibels que l’on a un peu de mal à supporter et qui sont identiques dans toutes les Caraïbes. Nous avons, hélas, raté un concert dans la montagne, à Nine Mile, lieu de naissance de Bob Marley, où se produisait son petit-fils Jo Mersa Marley et nous espérions y valider le maintien de la culture reggae.
Ravis de notre détour, après une petite semaine nous avons repris la route vers l’Est pour rejoindre St Martin, mais la distance et le fort vent contraire de la première semaine nous en ont fait baver. Nous sommes sortis de la logique rotative des vents dans les Caraïbes et tirer des bords s’est avéré interminable ; quand on longe Haïti, il est très déconseillé de prévoir un mouillage (en raison du risque des pirates) et le passage entre Cuba et Haïti, « le windward passage » nous a attaqué le moral et la réserve de diesel car nous avons dû faire tourner le bon gros Volvo pour franchir ce foutu canal.
Après cette très longue navigation, nous sommes arrivés à St Martin, où nous avons embarqué notre ami Christian, avant de reprendre des sauts de puce dans les petites Antilles. De bonnes et belles escales et mouillages que nous connaissions déjà et que nous avons retrouvés avec plaisir : Tintamarre, Fourchue, Colombier et St Barth et surtout un arrêt à Saba où nous avons eu la chance d’accrocher une des rares bouées afin de faire une bonne journée à terre : découverte un samedi (Sábado), c’est un volcan éteint de 13km², surnommée « la reine immaculée » où vivent 1900 ha sous autorité hollandaise. Elle accroche les nuages sur son sommet d’où une forêt tropicale féérique et 4 villages très coquets qui se sont appliqués à utiliser les mêmes toits rouges, façades blanches et boiseries vertes, c’est très réussi. L’accès très abrupt a empêché toutes les invasions et l’arrivée en avion n’est pas pour les âmes sensibles (la piste est la plus courte du monde avec ses 396m). Détail insolite, il y a, sur l’île, une université de médecine fréquentée par les Canadiens et Américains et qui sert de dispensaire au passage : un lieu de formation à recommander pour qui aime aussi la plongée.
Après un passage au ras de Redonda et un mouillage trop rouleur à Montserrat, que nous avons snobé cette fois ci, nous avons rejoint notre escale favorite à Terre de Bas aux Saintes, et l’agenda pêche/bricolage.
Coin de la bagnole de location : De temps à autre, pour faire des promenades à l’intérieur des pays, nous louons une voiture et c’est, souvent, une aventure : la conduite à gauche, les vitres teintées qui donnent l’impression de conduire la nuit avec des lunettes de soleil, les motorisations fatiguées, la pénurie d’essence à Cuba… mais c’est à Kingston que la voiture nous a lâchés et qu’après 4 heures d’attente, le loueur est venu nous en apporter une autre, le concert Mersa Marley en a fait les frais !
Coin des « oubliances » : l’âge aidant, ou l’excès de décontraction, nous faisons des conneries. La palme revient à Fred qui se rend compte qu’il n’a pas ses papiers au bout de 100km de trajet et que nous retrouverons, après un demi-tour, à l’hôtel où il les avait laissés sur la table !
Coin des fichiers « grib » : Tout bon marin jette un œil à la météo avant de tracer sa route et, de nos jours, des fichiers sont fournis avec des prévisions à quelques jours. Pour les Antilles-Guyane, matin et soir sur la VHF, radio de bord, on écoute le bulletin météo. Dans cette partie des Caraïbes, les fichiers nous ont fourni des prévisions très sous-évaluées, surtout dans le « windward passage » entre Cuba et Haïti et nous avons affronté du bon gros temps pendant 6 jours, au bout desquels nous étions comparables à 2 vieilles morues salées.
Lolo à Grand-Case à St Martin
Tour de St Martin
A Tintamarre, on a revu l'épave et on a trouvé la vieille piste d'atterrissage. "y'a pas un truc à récupérer, là?
A Fourchue, cette fois ci, nous sommes descendus à terre; depuis que les cabris ont été éliminés, les cactus "tête à l'Anglais" s'éclatent!
Sunset au Morne Vitet au dessus de notre auberge préférée à St Barth
Saba, la reine immaculée
Ascension du mont Scenery, point culminant de Hollande (900m et des brouettes) et tour de l'île.
Redonda, où un type s'est un jour auto proclamé roi et un rayon de soleil sur le volcan de Montserrat.
A défaut de voir la descendance Marley, vous êtes allé voir Johnny de plus près !