Sans nul doute, Cuba est notre meilleure destination depuis que nous sommes aux Antilles : le fait d’y venir en voilier et la durée du séjour nous ont permis d’apprécier ce pays incroyable et sa formidable population. Alors, bien sûr, « l’économie va mal » comme ils disent, le squelette de l’Etat perdure mais les écoles sont sans cahiers, les dispensaires sans médocs, les boulangeries sans farine …Le COVID a précipité le pays dans un manque chronique car les revenus du tourisme se sont arrêtés et n’ont pas vraiment retrouvé leur niveau de 2019 et Cuba ne remboursant pas ses dettes, le nombre de pays fournisseurs s’est amoindri. Seul le Vénézuela fournit du pétrole contre des haricots rouges.
La fusion des deux monnaies a conduit à une inflation galopante et l’Etat la camoufle en gardant un change officiel à 140 alors que dans la rue, sans se cacher le moins du monde, on change à 300 ! Tout le monde souhaite acquérir des euros pour approvisionner son compte car beaucoup de denrées ne peuvent s’acheter qu’avec la « tarjeta ». Aujourd’hui le système de « la libreta » qui fournissait les denrées essentielles ne fournit plus de quoi manger et les anciens qui ne peuvent compter que sur leur pension sont en situation misérable.
Les Cubains vivent donc dans un stress permanent : acheter du lait pour les enfants, réussir à combiner deux ou trois boulots : l’officiel qui te ramène un salaire de 30 euros (alors que la douzaine d’œufs est à 7 euros) et toute autre activité qui te permet de gagner le reste ( vente des cigares, change de monnaie, ouverture d’un petit commerce, fréquentation des touristes qui te fournissent des pourboires ou des objets en tous genres). Le pire est que beaucoup veulent quitter le pays et l’an passé, il se dit que 500 000 Cubains sont partis aux USA. L’Etat laisse faire comme si cela permettait de gérer la pénurie par l’envoi des aides à la famille, et il n’empêche pas le retour éventuel.
Ce sombre tableau nous désole, mais, à la différence de mes précédents séjours, tout le monde parle et veut partager sa vision des choses : de façon unanime, les Cubains estiment avoir été trompés, avoir été victimes de la propagande. Les Castro sont déboulonnés de leur piédestal et seuls les héros morts comme Cienfuegos ou le « Che » conservent leur affection. Ils accusent les dirigeants et leur entourage de s’enrichir sur leur dos et ils veulent du changement. Pour le moment, quelques manifs ont été réprimées et les gens arrêtés ont été libérés contre 100 $ (une fortune pour eux) et l’Etat a peur de l’embrasement. Je ne saurais dire s’il est imminent, car souvent, on sent que les gens seraient prêts à juste vivre « comme avant » pour peu que l’Etat couvre, à nouveau, les fondamentaux.
Au milieu de ce grand capharnaüm, les relations avec les Cubains sont sincères, amicales et très joyeuses. Leur gentillesse, leur grand sens de l’humour et leur curiosité ont été notre quotidien et nous avons bien mesuré la différence avec les pays précédents. Cuba est une destination particulière : un immense pays magnifique, des villes incroyables issues de l’architecture coloniale et un système agonisant qui structure encore le pays dans l’idéal socialiste. On ne se lasse d’observer ni l’un ni l’autre. Le 1° mars le carburant est passé de 30 à 400 pesos et depuis que nous sommes à Santiago, le courant est coupé chaque soir de 19h à 22h ; nous mesurons à quel point cela pourrait être source d’embrasement.
Cuba et le voisinage des bateaux ont mis sur notre route Paul et Flavie sur « estafette » et Françoise et Daniel sur « Lotus bleu » que nous comptons bien retrouver en métropole. Manu et Christine nous ont rejoints pour un circuit terrestre et maritime mais le vent du Nord (gota fría) n’a pas permis de beaux mouillages aquatiques.
Finalement, au gré des infos de nos voisins de ponton, nous avons changé notre circuit en faisant un crochet par la Jamaïque avant de remonter vers les petites Antilles.
Coin des attractions : A Puerto Plata, un « Ocean world » jouxtait la marina où nous avons fait halte afin de ravitailler le bateau avant Cuba. De notre bateau, nous pouvions entendre et observer une partie du « show » proposé, où une pauvre otarie faisait tenir un ballon sur son nez ; cela m’a rappelé la chanson du groupe québécois des années 70 « Beau Dommage » : « le phoque en Alaska ». Sinon, les grappes de croisiéristes qui déambulent dans le musée de l’ambre sont, à eux seuls, une attraction tout aussi navrante.
Coin du vent : Le voileux trouve souvent à redire au vent. Quand il y en a pas, il se morfond et jure après la « pétole » ; quand il y en a trop, il se fait brasser la couenne et il se demande pourquoi il est venu. C’est juste le vent qui commande!
Coin du sondeur : A bord, le sondeur sert à donner la profondeur sous le bateau, ce qui est capital pour aller traîner ses guêtres dans des eaux où le tirant d’eau le permet. C’est aussi un outil formidable qui permet de mesurer tes humeurs et la nature des relations de l’équipage, couple compris ; la navigation est une plongée à risques relationnelle pas banale.
Coin du dérapage : Dans la baie devant Cayo Largo, nous avons fait, avec Christine et Manu, notre première expérience de dérapage, échouage et sauvetage : un grain soudain a fait changer le vent à 180° et notre ancre s’est retournée devenant inopérante ! En 5 secondes nous étions posés sur le banc de sable sous une pluie battante … Heureusement Emilio a une dérive et un safran relevable et l’appel au 16 (secours en mer) nous a fourni un bateau pour nous tracter en 10mn et à un prix d’amis. Une fois à la marina, Fred a plongé sous le bateau pour vérifier l’absence de dégâts, gros morceau de chance et dans les 10mn un crocodile de bonne taille est venu roder autour du bateau. Très gros morceau de chance !!!
La Havane : Chef d’œuvre en péril
Viňales, sublime vallée avec ses « mogotes »via san Diego de los baňos et Las Terrazas.
Cienfuegos jumelée avec St Nazaire, au fond d’une immense baie, fondée par un Bordelais début XIX°, grande unité architecturale.
Playa largo, tour en mer
Marea del Portillo village de pêcheurs où Josefina nous a servi de guide
Trinidad en Chrysler 1956
Santiago : Ville en balcon au-dessus de sa baie, musicale et provinciale
Oh la la .. Cuba .. comme je vous envie ! Même si je pressentais une grande misère ... Tes photos me replongent plus de 20 ans en arrière ! il ne manque que le son ! Viñales reste identique ! Même plan du seul hôtel où les coqs saluent le lever du jour ! Même terre, même boeufs et pique boeufs... même araire de bois, même tabac, (qu'ils sont les seuls à fumer..).! Peut être que la pauvreté y est moins dure que dans les villes ?? Merci pour ce récit ! Besos Maryse